Pour la première fois depuis plus de dix ans, des scientifiques du Centre national de recherche (CNRS) et de l’Institut de radioastronomie millimétrique ont observé avec leurs collègues étrangers un phénomène très rare, émanant de la rencontre entre une étoile et un trou noir supermassif. Lorsqu’un tel événement se produit, la force de gravité déchire l’étoile : la matière qui la compose est disloquée, puis tourne très vite avant d’être engloutie par le trou noir. Exceptionnellement, il arrive alors que ce dernier émette des jets de matière voyageant à une vitesse proche de la lumière. C’est justement cette émission très rare, nommée cette fois AT2022cmc, que les équipes ont pu observer, et qui fait l’objet d’une publication le 30 novembre dans la revue Nature.
La dernière observation d’un évènement similaire datant de 2012, les équipes ont pu mettre à profit de nouvelles méthodes, notamment grâce au projet Zwicky Transient Facility : une puissante caméra, couplée à des logiciels spécifiques, permettant aux scientifiques de détecter en temps réel un évènement atypique et de donner l’alerte. La coordination rapide entre les équipes de recherche, chacune spécialisée dans un type d’observation, a ensuite été centrale dans l’observation de AT2022cmc. Le radiotélescope Noema2 a ainsi contribué à la caractérisation de la source et, grâce au spectrographe X-shooter Very Large Telescope de l’ESO, il a été possible d’évaluer la provenance de ce phénomène rare : estimée à 8,5 milliards d'années-lumière de la Terre et au centre de sa galaxie hôte. Une fois que l’intensité lumineuse de ce jet de matière sera réduite, la galaxie où cet événement a eu lieu pourra être vérifiée grâce aux télescopes spatiaux Hubble ou James Webb. Pour l’instant, les scientifiques ne savent pas encore pourquoi certaines rencontres entre étoile et trou noir émettent ces jets, alors que d’autres non. L’une des hypothèses avancées serait que les trous noirs, associés à ces types d’événements, tournent rapidement sur eux-mêmes. Cette rotation permettrait alors d’alimenter des jets aussi lumineux que celui produit par AT2022cmc. Les scientifiques espèrent que les capacités du Large Synoptic Survey Telescope (LSST), qui doit entrer en fonction en 2024, et pour lequel la France est d’un des principaux contributeurs, permettront de lever le voile sur ces événements rares et encore mystérieux.
Source : La presse du CNRS