Le kanvo, un pagne tissé introduit au Bénin par le roi Agonglo, un des souverains d'Abomey ayant régné au XIXe siècle, est de plus en plus prisé par les couturiers béninois dans leurs collections. Un tissu prestigieux, labellisé en 2020, que les créateurs intègrent désormais pour apporter une touche d’authenticité et d’originalité à leurs pièces. Le kanvo est ainsi au cœur de la création des couturiers.
Ce pagne tissé traditionnel est riche en couleurs et en motifs, il vient du royaume Dahomey, situé dans l'actuel du Bénin, et est porté par le souverain pour les grandes occasions. C’est un vêtement d’apparat qui « n'est pas un pagne ordinaire. C'est d'abord un pagne de prestige, un pagne noble », selon la créatrice Faridatou Modukpè Yekini, qui a fondé en 2017 la marque Modukpè.
Il incarne « la richesse béninoise, l’identité béninoise », estime Charlemagne Amoussou, un des vétérans de la mode béninoise, plus connu sous le nom de sa ligne de vêtements, Lolo Andoch. Le kanvo a une particularité : dans sa version brute, il est très lourd et pas toujours simple à manier sur les tables de coupe. Au fil des années, les couturiers ont trouvé la solution pour le rendre plus maniable : « On l’a retravaillé pour avoir quelque chose de très fin, qui est portable, qui est consommable, du coup, on a obtenu du kanvo assez léger », explique-t-il.
Mais cela ne suffit pas pour conquérir totalement la clientèle, souligne Lolo Andoch, qui explique utiliser aussi « du kanvo mixé avec du lin, mixé avec un autre coton, mixé avec de la soie, mixé avec tout ce qu’on veut. Parce que, quand c’est uniquement du kanvo, certains sont parfois un peu réticents. Le mettre en motifs décoratifs sur des vêtements ou en mixage avec un autre coton qu’ils connaissent, ça passe très bien ! »
Modukpè, qui réalise des robes de soirées, des chemises, des pantalons, des t-shirts et des accessoires, fait remarquer que le pagne tissé est sa matière de prédilection. Sa dernière collection en date, baptisée « collection Ola », a eu beaucoup de succès, elle qui contenait une pièce coup-de-cœur, « une robe en total kanvo pour toutes les occasions ; l’idée m’est venue comme ça de fusionner le Agbada classique, trois pièces de vêtements en une seule pièce. Il y a de la broderie, qu’est-ce qui nous distingue des autres, c’est notre broderie. C’est très agréable, je me sens toujours mieux quand je porte du kanvo et je le porte tous les jours ».
Lolo Andoch, pionnier et chantre dans l’utilisation du kanvo, a même ouvert un showroom à Cotonou. « Par an, nous sommes autour de 2000 - 3000 mètres [de tissu vendu, NDLR], ce qui est bien, on l’utilise beaucoup aujourd’hui pour les mariages en tenue moderne », s'enthousiasme-t-il, observant un engouement des béninois pour ce tissu emblématique.
Plusieurs évènements nationaux célèbrent le kanvo, qui sera à l’honneur en octobre dans le cadre du mois « Tu consommes local » organisé par le ministère du Commerce. Mais celui-ci s’exporte également : Lolo Andoch a en effet remporté un prix au Mali et Mondukpè a présenté un défilé à Lomé le 24 août 2024. Rfi